Celebration, Florida est le fruit du croisement de deux ambitions. Si cette ville-privée fondée en 1994, avait une maman ce serait une entreprise et elle s’appellerait la Walt Disney compagnie. Si cette communauté de 11 000 habitants avait un papa ce serait un mouvement architectural et il s’appellerait "New Urbanism".
D’abord désigné en interne sous le titre de "Florida Project", les développements spectaculaires que la compagnie Disney allaient organisés autour d’Orlando devaient beaucoup à son fondateur. Walt Disney prévoyait qu’autour d’un parc à thème géant, le Magic Kingdom, seraient implantées d’autres entités dont une "ville du futur", EPCOT (pour Experimental Prototype Community of Tomorrow). La société acheta pour cela plus de 11 000 ha (soit 110 km², soit 2 fois la taille de Manhattan ou 150 fois la taille du parc Disney californien).
Jusqu’à sa mort en 1966, Walt Disney travailla presqu’à temps plein à imaginer sa mégalopole. Inspirée de l’urbanisme moderne triomphant des années 60, cette ville réseau dense et technologique devait être reliée à un réseau de trains à grande vitesse et accueillir toutes les créations de l’industrie américaine d’alors. « Il parlait des heures des maisons et de comment les enfants se rendraient à l’école » se souvient Marc Davis, dessinateur. « Il parlait même pendant des heures de comment les ordures seraient collectées. Il ne pensait vraiment qu’à ça. »
Le premier parc ouvrit en 1971. EPCOT, le second parc ouvrit en 1982 mais en tournant le dos à l’ambition de départ. Ce parc d’attraction développant plutôt le monde en miniature et les technologies de l’image. Enfin deux autres parcs ouvrirent avant l’année 1990 sans avoir totalement entamé le foncier colossal acheté par Walt Disney.
Peter Rummell fut alors chargé d’évaluer les potentialités de ce terrain disponible et conclut que les futures ambitions de la société n’entameraient pas les terres situées au-dessous de la route US 192, seule voie publique traversant le territoire Disney. « Nous aurions pu alors tout vendre mais mon sentiment était que ce n’était pas la bonne stratégie parce que nous allions encourager un développement bas de gamme et peu attractif. Ce que je voulait faire c’était d’encourager d’autres promoteurs à développer des projets vers le Sud en implantant un lieu de vie de qualité avec des écoles et le reste ». Le projet de communauté de vie pilotée par Disney était lancé.
Si dans les années 60 les rêves de Walt se formalisait sous la forme d’une citée futuriste, au début des années 90, les ambitions immobilières de la firme s’engagèrent dans une autre voie.
Le nouvel urbanisme (New urbanism), désigné aussi comme urbanisme néo-traditionnel, est un courant urbanistique né d'abord en Europe, puis aux États-Unis d’Amérique, pays où il s'est développé et dans lequel il a connu une grande popularité des années 1980 au début des années 1990. (source Wikipedia) Parmi les précurseurs en Europe, on compte François Spoerry, Maurice Culot et Léon Krier ; les développements américains ont été assurés entre autre par Calthorpe, Duany, Moule, Plater-Zyberk, Polyzoides ou Solomon. Pour ses apôtres du retour à la ville, l’attraction "Main Street USA", ou la recréation nostalgique de la grande rue d’une ville américaine imaginaire des années 40, anticipait des solutions réelles pour combattre l’étalement urbain.
C’est dans cette mouvance prônant le retour à la ville de petite échelle, "marchable" et pittoresque que s’inscrit presque logiquement le projet. Organisé autour d’un lac, un quartier commerçant est struturé par la Market Street. Les bâtiments les plus emblématiques ont été confiés à Philip Johnson, César Pelli, Charles Moore, Robert Venturi ou Michael Graves. Autour de ce centre post-moderne, des maisons alignées le long de rues plantées. Les voitures et les garages sont invisibles. A l’origine aucune maison ne devait pas être située à plus d’une mile du centre mais ceci n’a pas été respecté.
Le masterplan a été développé par la firme Cooper, Robertson & Partners et par Robert A. M. Stern. Le paysage, les parcs, les allées ou les chemins ont été développés par EDAW (maintenant AECOM) de San Francisco.
Les habitations suivent toutes un modèle d'architecture prédéfini. Il y a en tout cinq styles architecturaux « acceptés », tous pré-approuvés par Disney et s'inspirant des maisons coloniales, méditerranéennes, françaises, de Nouvelle-Angleterre ou encore victoriennes. Ces modèles se déclinent en sept tailles différentes qui sont mélangées dans les quartiers de la ville, la cohésion architecturale de l'ensemble étant assurée par le style Disney. (source Wikipedia)
En 2001, Celebration a été couronnée comme la "New Community of the Year" par le Urban Land Institute.
Dans cette ville à 94% blanche, les kilomètres de porches sont déserts de même que les parcs entretenus à l’extrême. La piscine et les terrains de sports réservés aux résidents sont gentiment occupés. Le centre est animé et les visiteurs sont bien accueillis. On nous confirme que malgré les apparences le film Truman Show n’a pas été tourné ici. On roule doucement dans les rues vides et calmes. Nous sommes le week-end mais nous ne croisons personne.
Sur la vitrine d'un agent immobilier cette phrase résume l'expérience : "Whe have the key to how life should be".
Entre 2002 et 2004, la compagnie Disney s’est désengagée de la ville en vendant le foncier et les actifs.
La ville serait même devenue une ville normale. Le 29 novembre 2010 elle a connu son premier crime. Le 2 décembre 2010 un forcené a tiré pendant 14 heures sur les policiers (sans les atteindre) avant de se suicider.
Epilogue : Elizabeth Plater-Zyberk (née en 1950) et cofondatrice du New Urbanism est aujourd’hui la directrice de l’école d’architecture de Miami. Elle a publié en 2000 le best seller Suburban Nation: The Rise of Sprawl and the Decline of the American Dream.
An urban autopsy of the contemporary American city by two French architects spending several months in the US. Picking places, highways, buildings, parks, neighborhoods, docks or urban structures to build a universal urban grammar : our suburban collection. Une autopsie urbaine de la ville américaine par deux architectes français passant quelques mois aux États-Unis.
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