De 1921 à 1954, Simon Rodia, émigré italien, a érigé plusieurs tours d'acier et de céramique dans le jardin de sa maison du quartier de Watts.
Ouvrier du bâtiment, ne connaissant du continent européen que les faubourgs de Naples, il a implanté au cœur de la grande plaine sans fin de Los Angeles une des construction parmi les plus singulières de l'agglomération.
Les Watts Towers, ont échappées de très peu à la destruction en 1958 avant d'être classée en 2010 en tant que National Historic Landmark.
Dès 1971, Banham comprend bien leur importance emblématique pour LA (et pour le quartier de Watts qui connu de graves émeutes en 1965) :
" La fantaisie de l'innocence possède à Los Angeles son monument le plus personnel et le plus achevé [...] : il s'agit du faisceau des tours construits à Watts par Simon Rodia. de toutes les cosnrtcutions locales, elles seules sont devenues si fameuses qu'il n'est même plus besoin de décrire le réseau fuselé de leurs éclats de poterie pris dans le ciment, soutenu par une structure de ferraille et de fil de fer. On ne saurait les comparer à rien, et surtout pas aux divers modèles proposés par des historiens qui ne les ont jamais vues : seule leur présence réelle rend justice à l'esprit authentiquement original et créatif qui les anima.
Les 33 années de travail acharné que l'artiste leur consacra à leur édification, la fraîcheur et la liberté avec laquelle il a exploité les rebuts de l'abondance technique, sa détermination à "faire quelque chose de grandiose", sa capacité à s'éloigner d'elles dès qu'il les eut terminées, en 1954 - tout cela met Rodia de plain-pied avec les surfeurs, amateurs de vol libre et autres plongeurs, qui tous incarnent la tradition très californienne d'une recherche individuelle du satori. [...]
Les tours de Watts, elles, sont ausssi uniques qu'elles sont en adéquation avec Los Angeles, une ville où la fantaisie architecturale est bien plus perceptible dans l'espace public que dans l'espace privé."
Jean Rolin, qui les découvre depuis l'arrêt de la 103rd Street du métro de Los Angeles, cet "équivalent californien du palais du Facteur Cheval" s'inscrit avant tout dans un non site :
"Cette ligne bleue est pour l’instant la plus longue de tout le réseau, et la seule – avec la verte, qui lui est perpendiculaire – à desservir ces quartiers sud où la prédominance afro-américaine est désormais battue en brèche par la concurrence hispanique. Elle donne l’occasion de faire des découvertes sociologiques d’importance,
dans le genre de celle-ci : les pauvres, à Los Angeles, vivent – ou plutôt habitent – exactement comme les riches, mais en beaucoup moins bien. Mêmes fastidieux alignements de maisons individuelles, souvent entourées de jardins, sauf que les uns et les autres sont nettement plus petits et plus moches. Dans l’intervalle se succèdent des usines et des entrepôts aux murs tagués, des zones ferroviaires survolées de lignes à haute tension, des terrains vagues où une imagination craintive peut se représenter des scènes effroyables. Les lieux de culte sont nombreux – dans l’ensemble, les pauvres, aux Etats-Unis, adorent les mêmes dieux que les riches, mais parfois sous des étiquettes différentes – et les mêmes palmiers, sensiblement plus espacés, dressent à des hauteurs peu croyables leurs chétifs plumeaux."
Que les Watts Towers constituent un accident ou un révélateur de la matrice urbaine de Los Angeles, les alentours de la 107th rue sont aujourd'hui relativement visitées.
Un centre d'animation, une maison de quartier (apparemment financées et inaugurée par le gouvernator Arnold Schwartznegger) et des intervenants architectes de UCLA : une oasis dans le désert de South Central.
An urban autopsy of the contemporary American city by two French architects spending several months in the US. Picking places, highways, buildings, parks, neighborhoods, docks or urban structures to build a universal urban grammar : our suburban collection. Une autopsie urbaine de la ville américaine par deux architectes français passant quelques mois aux États-Unis.
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